L E S
 A R T I C L E S
CATHERINE, il suffit d'un amour

 

Paris -Normandie 20 mars 1986
La plus longue fresque historique jamais réalisée à la télévision

Son nom a figuré plus de 150 au générique d’émissions de variétés, de telle sorte que Marion Sarraut n’est pas une inconnue des téléspectateurs. Mais cette fois, ce n’est pas une émission des Carpentier qu’elle réalise, mais une gigantesque saga qui nous transportera en plein XVe siècle et nous contera les amours de Catherine et du séduisant Chevalier de Montsalvy. Un quart de siècle d’histoire de France vu sous la plume de Juliette Benzoni, la « mère » comblée de « Catherine », un personnage qu’elle fit revivre tout au long de sept romans qui, dans les années 60, se vendirent à plus de 30 millions d’exemplaires de par le monde.

« C’est la seconde fois que je mets en scène un roman de Juliette Benzoni, me précise Marion Sarraut. La première fois, il s’agissait du feuilleton « Marion, une étoile pour Napoléon ». Mais avec « Catherine », coproduit par Antenne 2 et la S.F.P, il s’agit d’un travail de longue haleine ! ».

C’est en effet le moins que l’on puisse dire, puisque 15 mois de tournage, la participation de 200 comédiens, la création de 1.5000 costumes, et 130 chevaux auront été nécessaire pour rendre compte de l’œuvre de Juliette Benzoni et en faire un feuilleton de 6’ épisodes. Le plus long de toute l’histoire de la télévision française. « Si nos comptes sont exacts, la diffusion devrait en effet se poursuivre jusqu’au 15 juin prochain ! Une très longue aventure, certes, mais extrêmement réjouissante. « Pendant près d’un an et demi, nous avons tous formé une extraordinaire famille, il y eut entre nous un profond attachement dès les premiers jours. Aujourd’hui encore, j’entretiens de très forts liens d’amitié avec tous les comédiens. Jamais en tant que réalisatrice cela ne m’était arrivé »

Une aventure dans laquelle tous se jetèrent tête baissée y compris nombre d’acteurs et d’actrices connus qui acceptèrent avec joie de se « sacrifier » pendant de si longs mois, au risque de devoir refuser des propositions de travail extérieur. « C’est sans doute le propre ses acteurs de théâtre, poursuit Marion Sarraut, que de posséder une certaine solidité. J’aime ces gens-là. Avec eux, on peut sans risque travailler sur une longue, très longue distance.

Ainsi, Claudine Ancelot, qui bien que débutant ici à la télévision, avait derrière elle une solide formation théâtrale. Tout comme son partenaire masculin dans le feuilleton, elle s’est jetée à cœur perdu dans cette aventure passionnante du roman historique, acceptant toutes les exigences du genre. Car outre leurs costumes parfois très lourds, j’ai demandé à tous ces comédiens de porter sur leurs épaules le poids de la morale de l’époque. Morale religieuse (les gens regardaient alors très haut), politique, sociale… La dimension d’une fiction historique étant bien supérieure à une fiction contemporaine. Je pense que nous sommes parvenus à faire passer cela. En tous cas, Juliette Benzoni a complètement reconnu son ouvre dans la série. Bien sûr, celle-ci aurait mérité d’être diffusée à 20h30. Mais il n’est pas interdit de rêver à une rediffusion ! »
Propos recueillis par François B
erdeaux



Le Bien Public...
Jeanne d'Arc existe... et Châteauneuf l'a rencontrée...

Pauvre Jeanne d'Arc ! Après avoir connu les affres du bûcher à Rouen, elle a subi, hier à Châteauneuf-en Auxois, les morsures glacées d'un hiver qui ne veut pas croire au printemps... Et pour triomphale qu'ait été son arrivée au château, la vérité historique n'y a pas trouvé son compte.

Et pour cause : cette Jeanne d'Arc - là est celle de Marion Sarraut, une réalisatrice de télévision qui tourne pour Antenne 2 un feuilleton en 125 épisodes, Catherine ». Une saga en costumes, à mille lieues de Dallas et des millions de toises de Châteauvallon mais qui, comme eux, est essentiellement enregistrée en vidéo. Petit écran et coût de production obligent...

Une héroïne du XV° siècle

Nos lecteurs beaunois ont eu, hier dans nos colonnes, la primeur de cette saga moyenâgeuse. Pour tous les autres, rappelons que Catherine est l'héroïne d'un roman de Juliette Benzoni, qui se déroule au XV siècle, Siècle agité s'il en fut, où Catherine, d'amour déçu en espérance comblée, croisera la route de Charles VII, Jeanne d'Arc et... des Bourguignons I

Mais pas comme vous l’imaginez : dans les scènes tournées hier, Châteauneuf jouait le rôle d'Orléans ! Une liberté nécessaire à la fiction télévisée et qui faisait sourire Juliette Benzoni, présente sur le tournage. « Ça se passe au mieux. Et j’aime tellement la Bourgogne ! D'ailleurs, j'ai vécu dix ans à Dijon. J'ai toujours été amoureuse de Châteauneuf que j'ai découvert à l'âge de 15 ans. J'ai pensé y acheter une maison, mais elles sont trop chères aujourd'hui ! ».

Rançon de la gloire : sous le feu répété des caméras (comme celle de Lelouch récemment), le promontoire de l'Auxois est aujourd'hui connu du monde entier... le charme orléanais dût-il en prendre ombrage !

Et sous l'objectif de Marion Sarraut (que vous connaissez au moins comme la réalisatrice de Marianne, une étoile pour Napoléon), la belle Jeanne, Isabelle Guiard, a promené sur le pont levis du château son regard couleur d'ardoise et sa farouche volonté de bouter l'Anglais ». Dans la foule anonyme qui l'attendait au-delà des douves, Philippe Clay cachait son double mètre sous une robe de bure, et Michel Dupleix faisait battre sous l'armure le cœur généreux du gouverneur d'Orléans.

« J'ai pas mon permis cheval »
Mais les véritables héros de ce tournage à Châteauneuf étaient incontestablement les chevaux. Pardon, les fiers destriers trimballant sur leurs croupes la Pucelle et sa troupe. Des chevaux venus de Paris à grands renforts de modernes vans, et qui ne semblait pas autrement surpris de ce retour cinq siècles en arrière. Leurs cavaliers l'étaient bien davantage et l'on surprenait, sous le heaume, des dialogues comme celui-ci :

«  Hé, ton bourrin est rentré dans le mien ! On fait un constat à l'amiable ou quoi ?
T'es fou ! Moi j'ai pas mon permis cheval. Sorti de ma 2 CV, tu sais… »
Les authentiques spadassins, contemporains de Jeanne d'Arc, s'en sont sûrement retournés dans leur tombe. Mais les téléspectateurs (diffusion du feuilleton prévue au début de l'année 1986) n'en sauront rien. Car le miracle de la télévision consiste aussi à rendre à l'Histoire un visage parfaitement crédible. En attendant, et si le cœur vous en dit, mettez donc votre week-end à profit pour partir à la rencontre de Catherine et de Jeanne sur les routes bourguignonnes. Elles y seront encore. Et n'oubliez pas la seule politesse que vous leur devez le silence ! Elles tournent...

 
 



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